Nouveau week-end, nouvelle expédition. Cette fois, certains d’entre nous ont décidé de se rendre à Jérusalem, où nous allons passer la nuit dans un appartement trouvé sur Airbnb. Je me réjouis beaucoup de découvrir cette ville dont j’ai tant entendu parler, qui a une histoire si ancienne et si chaotique.
Alors bien sûr, je me réjouis moins de la “frontière” que je vais devoir à nouveau traverser pour y accéder. Comme d’habitude, sur la route, nous traversons de nombreux checkpoints, sur de nombreuses routes bordées de très, trop nombreux drapeaux israéliens, comme un constant rappel qu’ils ne sont pas prêts à laisser la Palestine aux Palestiniens. Encore une fois, on se rapproche du mur, des tours de guets. Nous passons par tous les portiques, nous patientons, nous montrons nos passeports, répondons aux questions. Cela peut sembler anodin, pour nous, une fois de temps en temps, mais ne l’est pas quand on pense à tous les gens qui doivent le faire tous les jours.
Bien qu’une distinction soit faite entre la partie est et ouest de la ville, il n’y a pas de frontière à l’intérieur de la ville. Les Palestiniens de Jérusalem-Est doivent posséder une carte de résidence israélienne, dont le prix est dur à payer. De plus, comme le reste de la Palestine, ils ne sont pas épargnés par les violences, la destructions de leur maisons et l’implantation de nouvelles colonies. Pour en savoir plus, je vous recommande cette article:
Notre arrivée à Jérusalem est un gros choc pour nous tous. L’atmosphère très occidentalisée de l’ouest de la ville, les infrastructures telles que les tramways et les bâtiments modernes, l’ambiance insouciante et décontractée des bars, le soir… nous avons l’impression d’avoir changé de continent. Comment un univers si différent de Naplouse peut-il exister à seulement quelques heures de là? Et il y a cette paranoïa, toujours. En chemin, nous devons nous mettre d’accord sur ce que nous allons dire à propos de notre présence dans la région à l’homme qui nous met son appartement à disposition pour deux nuits. Je suis contre le fait de mentir, je ne vois pas pourquoi nous devrions avoir quoi que ce soit à cacher, surtout que nous ne sommes que des volontaires; mais il est vrai que ces choses-là sont délicates… Nous finirons par lui dire la vérité, qui n’a pas l’air de lui déranger.
Je crois qu’au début, nous sommes tous un peu mal à l’aise. A regarder les gens profiter de leur soirée (ce que nous ne pouvons reprocher à personne), nous ne pouvons nous empêchons de penser à l’occupation, à se demander s’ils la supportent, comment ils peuvent mener une vie normale dans de telles circonstances, s’ils agiraient différemment avec nous s’ils savaient d’où nous venons. Difficile de faire abstraction, sachant tous ce que nous savons. J’ai presque l’impression d’être une intruse.
Mais les gens d’ici ne vivent pas si insouciamment que ça. Le lendemain, lorsque nous explorons la ville, nous découvrons des hordes de soldats, ainsi que des civils arborant fièrement une arme à leurs bras que nous croisons régulièrement. La tension est palpable.
Cela ne nous empêchons de passer une journée très plaisante à découvrir Jérusalem. Je ne cacherai pas que je me sens beaucoup mieux dans le quartier musulman de la vieille ville que partout ailleurs. Nous nous amusons à parler quelques mots d’arabes avec les vendeurs surpris. Histoire de dire “nous ne sommes pas touristes normaux, nous supportons votre cause…”
La vieille est truffée d’endroits historiques et magnifiques, tel que le Mur des Lamentations, la mosquée Al-Aqsa, et l’église du Saint-Sépulcre, entourée du fameux Mont des Oliviers.
Le reste de la ville est également très joli, quoique bien plus moderne. Il y a un parc entouré d’une belle vue, qui abrite le musée de l’Holocauste. Sa visite me bouleverse, et je quitte cet horrible rappel de ce dont l’homme est capable en pensant: “Est-ce que nous apprendrons jamais de nos erreurs?”
Dernière étape, nous avons entendu parler d’un petit village appelé Lifta, dernier vestige d’un lieu palestinien tel qu’il était en 1948, avant que tout ça ne commence. Là-bas, des ruines de maisons dont les gens ont été expulsés entourent une source d’eau chaude où des israéliens se prélassent, insouciamment. L’histoire de cet endroit semble complètement niée, comme le témoigne les panneaux qui y mènent, où l’inscription en arabe a été barrée…
C’est sur cette dernière impression dérangeante que nous quittons Jérusalem, impatients de rentrer à la maison…