Bonjour à tous!

J’espère que vous avez profité de la joie d’être en compagnie de vos proches pendant les fêtes, et que vous avez survécu au matraquage commercial de cette période de l’année.

Nul besoin de vous rappeler que 2018 a touché à sa fin et a été remplacée par 2019. J’ai beau être un peu en retard, c’est tout de même l’occasion de ne pas être originale du tout et de continuer une tradition qui me tient à cœur: celle de faire un petit bilan. Mais avant cela, je voulais d’abord rapidement revenir sur mon dernier voyage en date (ben ouais, à la base, Sowanders c’est quand même un blog de voyage): le Maroc.

Je m’y suis rendue début novembre, pour rejoindre des amis dans ce pays magnifique. Ce n’était pas la première fois que j’allais au Maroc, vous le savez. En effet, il y a de cela quatre ans, un voyage spontané de trois semaines là-bas a influencé la décision la plus importante que je n’ai jamais prise: celle de quitter la certitude de la vie que j’aurais pu construire en Suisse en échange des aventures et des leçons qui m’attendaient sur la route. Alors forcément, m’y retrouver à nouveau était aussi une opportunité de contempler toutes les choses que j’ai accomplies depuis lors.

Ce voyage a donc été plutôt tranquille et propice à la réflexion, l’occasion pour moi de me reposer, mais aussi de prendre plein de photos d’un pays vibrant et coloré; ce sont elles qui orneront mes mots tout au long de ce texte. Elles proviennent pour beaucoup du petit village d’Imsouan et ses environs, où nous étions basés, ainsi que d’un roadtrip de quelques jours en direction du Nord, avec pour destination Chefchaouen.

25.11.2018

“J’aurais préféré écrire ces lignes dans un nouveau carnet, car j’ai l’impression d’avoir tourné bien plus d’une page. Je suis une personne nouvelle. Une version “mise à jour” de moi-même, depuis la dernière fois que je suis venue au Maroc.

Pourquoi pas. Cette éternelle question qui a tant changé pour moi résonne encore dans ma tête, vestiges d’une impulsion née lors de mon premier séjour ici, une recherche d’autres possibles.

Peut-être que j’ai enfin trouvé la réponse à cette question. Peut-être que la réponse à “pourquoi pas?” est en fait un point à la place du point d’interrogation.

Cesser de questionner ma vie, de chercher à la justifier et commencer à l’affirmer. Vivre, tout simplement!”

Nous sommes maintenant en 2019. Exactement quatre ans après mon premier séjour au Maroc, en janvier 2015, et bientôt quatre ans depuis la création de ce blog.

Qui dit fin et début d’années dit perspective sur les douze mois qui se sont écoulés. En ce qui me concerne, je peux sans peine affirmer que 2018 aura été l’une des plus belles années de ma vie. Ironiquement, elle a succédé à la pire. Le soleil qui perce entre les nuages, la lumière au bout du tunnel, le sommet de la montagne; interprétez-le comme vous voulez, mais ce qui est sûr, c’est que de m’être trouvée au milieu de tant d’obscurité m’a permis de réellement apprécier la lumière, une fois rallumée. Oh, bien sûr, il y a encore beaucoup de noir qui côtoie beaucoup de blanc, et surtout une infinité de nuances de gris entre les deux.

Une vie, ça peut être si court et si fragile mais c’est aussi bien long et je sais maintenant qu’il peut s’en passer, des choses, au fil des années. Parfois, une angoisse me réveille au milieu de la nuit, la peur envahissante que quelque chose n’arrive aux gens que j’aime, la terrible constatation que notre monde est en train de sombrer vers le chaos et la destruction à cause de nos actions quotidiennes, et puis, le terrorisme, les maladies, les accidents, la guerre, que sais-je! Le danger nous guette tous, tout le temps. C’est souvent difficile de concilier cette partie de moi liée au grand tout, cette conscience des problèmes du monde, à la futilité de mes petits problèmes personnels.

Pourtant, j’apprends de plus en plus qu’une vie humaine est faite de toutes ces contradictions et que les plus petits détails de l’existence peuvent receler un pouvoir immense, alors que de grands événements universels n’ont au final que peu d’impact sur notre quotidien. Tout est une question de temps, bien sûr, et le fait que nous soyons tellement connectés veut dire que tout finit par nous rattraper un jour. Ce qui est surprenant, c’est qu’il est impossible de savoir quoi, quand, comment, et c’est souvent dans l’inattendu et l’anodin que la vie prend vraiment son sens.

Moi, en attendant, dans tout ça, j’ai l’impression de grandir et d’avancer gentiment, à mon rythme. Les réponses ne me sont jamais venues brutalement, mais m’ont plutôt été dévoilées au fur et à mesure des rencontres et des expériences, et continuent à apparaître petit à petit, alors que mes pas m’amènent lentement vers une certaine destination encore inconnue, que j’ai l’impression de connaître sans tout à fait savoir où elle est. Oh, comme j’aime le recul de pouvoir regarder ma vie comme si elle était un livre, guettant son sens, l’organisant en chapitres, trouvant ses éléments déclencheurs, ses péripéties, ses personnages principaux.

Le Chemin de Compostelle a bien incarné ce lent cheminement. J’y pense encore à chaque fois avec un grand sourire sur mon visage, et je m’en souviens comme l’une des plus belles expériences de ma vie, sans aucun doute. Les mots me manquent encore pour exprimer la gratitude qui m’empare en repensant aux rencontres, aux messages, aux enseignements que j’ai trouvés sur la route vers Saint-Jacques… Tout simplement, au cadeau que cela a été, un cadeau que j’ai offert à moi-même et qui m’a peut-être sauvée. Comment aurais-je pu continuer dans cette vie, sans me donner la considération que je mérite?

Me pardonner, et avancer.” Telle était mon intention placée avant de marcher, le mantra qui m’accompagnait au fil des kilomètres, mais j’aurais tout aussi bien pu le remplacer par : “Oser m’aimer.”

2018, c’est l’année où j’ai appris à m’offrir du temps et de l’espace pour faire des erreurs, à lâcher prise de cette obsession du “tout, tout de suite” et de la perfection. A accepter et apprécier le désordre, à l’image de cet article tâtonnant. Parce qu’avancer lentement, c’est toujours mieux que de ne pas avancer du tout. Le mouvement, c’est quelque chose de vital. Il y a deux ans, je n’avais presque physiquement pas le choix de bouger, la douleur ayant envahi mon corps et mon esprit, me rendant étrangère à moi-même, paralysée, incapable d’avancer. Maintenant, je vais un peu plus doucement, mais j’y vais. J’emprunte différents chemins, j’ouvre timidement quelques portes. Où est-ce que je vais? L’avenir me le dira…

“Le courage ne rugit pas toujours. Le courage est cette petite voix intérieure qui nous dit à la fin de la journée : j’essayerai à nouveau demain.”

– Mary A. Radmacher

A mon retour d’Espagne après une telle renaissance, je ne savais justement pas où aller. Alors, au lieu de m’élancer inconsciemment vers de nouvelles aventures, j’ai préféré me poser et chercher plus lentement. Certes, je suis quand même repartie (chassez le naturel, il revient au galop), mais cette fois sans ce désir effréné d’aller toujours plus loin, de partir pour partir. Et vous savez quoi? Il s’est passé un peu moins de choses dans ma vie, cet été. En fait, je n’ai même vraiment rien fait de très “productif” pendant quelques temps. Et alors qu’une voix jugeuse a voulu, et voudrait toujours me convaincre que c’est une preuve de ma paresse, de ma faiblesse, de mon manque de discipline, il y en a une autre, à qui j’apprends à donner plus de place, à entendre plus fort encore que la première, et celle-ci me murmure: “Je suis assez.”

“Je suis assez.”

Non pas “je fais assez”. Car je commence à comprendre que ce perfectionnisme irrationnel, ce besoin d’achever l’impossible, c’est une manière de me convaincre que le jour où j’aurais écrit 15 livres, terminé 3 doctorats, vu tous les pays du monde et cetera, là, enfin, je serai assez. Et vous savez quoi? Je suis assez, là, maintenant, tout de suite. Je suis assez, dans tous mes défauts, toutes mes erreurs, toute mes faiblesses. Et toi qui me lis, tu l’es aussi. Le simple fait d’exister demande courage et persévérance, et pour cela, tu as toute mon admiration.

J’ai parlé à l’une de mes merveilleuses cousines lors d’une fête de famille, cet été, et quand je lui ai dit que le Chemin était l’une des meilleures choses qui me soit jamais arrivée, elle m’a répondu, dans les grandes lignes: “Tu sais, Sophie, ça ne t’es pas arrivé. C’est toi qui l’a fait arriver. C’est toi qui a marché chacun des kilomètres te séparant de l’arrivée, personne d’autre.”

Et c’était une belle piqûre de rappel, car en effet, personne ne peut marcher à notre place. Alors, je n’ai peut-être pas tout fait parfaitement, mais au moins, j’ai essayé. J’y suis allé. A bas la perfection! J’ai accepté le fait que la plupart des choses qui en valent la peine prennent du temps, et j’ai travaillé dans cette direction, en me perdant aussi, souvent. J’étais reconnaissante qu’on me le rappelle.

Ainsi, j’ai repris du poil de la bête. Je me suis reconnectée à mon corps et j’ai accepté l’importance de m’en occuper. Marcher était un début, et cela a été suivi par de nombreuses tentatives d’exercice régulier (souvent infructueuses, je l’avoue). J’ai marché 900 km, et puis j’ai fait 900 km de vélo. Pour quelqu’un qui est souvent considérée, à mes yeux comme ceux des autres, comme délicate et fragile, cela m’a fait du bien de me sentir forte, que je ne me briserai pas si facilement, que je peux tenir la distance. Je suis maintenant plus enracinée et mes jambes peuvent m’emmener loin, mes épaules peuvent porter beaucoup. Même si des fois, mon corps doit aussi se reposer.

Parce que ce n’est pas qu’une question d’être “forte” ou pas. Il y a vraiment des choses que seul le temps peut guérir. Le temps est un concept étrange. Il paraît parfois vide de sens. Comme lorsque tu rencontres un vieil ami, et que c’est comme si rien n’avait jamais changé. Ou que tu retournes dans un lieu où tu t’es déjà rendu et que tout a l’air identique, alors que rien n’est plus pareil…

L’amour de soi! Quel voyage incroyable cela a été, de me permettre de tomber amoureuse de moi-même. Cela a changé ma vie. M’aimer, ça a été prendre soin de mon corps, comme je l’ai déjà mentionné, mais encore plus de mon cœur et de mon esprit. Cette année, une conscience nouvelle des maux qui affectent mon cerveau est née, et m’a permise de mieux préparer les hauts et les bas de la montagne russe qui m’habite. Cela n’entend pas que je serai tout le temps heureuse; au contraire, pour moi, cela veut dire honorer ma douleur et ma tristesse en lui donnant l’espace et l’attention qu’elles méritent.

Cela signifie aussi m’accepter réellement pour ce que je suis, et que ce n’est pas grave si je suis un peu différente des gens qui m’entourent. Je mérite quand même mon amour. Mes manières de vivre et de percevoir le monde font partie des couleurs qui constituent l’espèce humaine. Et c’est aussi l’une de mes sources principales d’inspiration; si je ne me sentais pas un peu triste, en besoin de confort et d’introspection, je ne serais pas en train d’écrire ces lignes. Sans compter que la peine que je ressens est une des sources principales de mon empathie pour le monde et ses habitants, ce dont nous avons tous désespérément besoin en plus grande quantité, je crois.

J’ai aussi blessé quelques personnes. Car au fil de ma route qui m’enseigne à m’aimer, j’apprends qu’il est parfois essentiel de penser à soi avant les autres. Bien sûr, je n’en suis pas heureuse, mais je ne le changerais pas. Je ne peux pas être ce que tout le monde attend de moi, et je ne peux pas m’excuser éternellement pour tous mes choix de vie.

Mon attitude face au voyage a aussi évolué cette année. Alors que j’ai fini mon dernier périple vidée, désillusionnée et un peu nauséeuse face à ce dont j’ai été témoin dans l’industrie du voyage et ce qu’elle est en train de devenir, pleine de doutes à propos de mes propres choix, je lui ai donné une autre chance cette année. J’ai redécouvert la beauté des choses simples, que je n’avais pas besoin d’aller à l’autre bout du monde pour être ébahie face à la vie.

Je crois qu’en fait, la vraie beauté se trouve avant tout dans les rencontres, que l’on soit ici ou ailleurs. Et il y a des gens magnifiques partout, si l’on choisit de les voir. Si l’on ne regarde pas avec ses yeux. Encore une fois, je reviens à ce sujet car il est essentiel. En apprenant à s’aimer, on s’ouvre à l’amour des autres. Sans l’amour, rien de tout cela n’aurait de sens. C’est notre nature d’êtres sociaux de chercher la connexion. Un rire partagé ou un joli souvenir valent bien plus que n’importe quel objet. Je suis si reconnaissante que certaines personnes m’aient choisie pour ouvrir leur cœur et me donner leur confiance et leur amour. J’ai tant reçu d’eux.

Que puis-je conclure de tout ceci? Et bien, peut-être est-ce un encouragement à rester douce envers les autres et envers moi-même…

J’aimerais apprendre à mieux apprécier les choses que j’ai accomplies au lieu de toutes les opportunités ratées, tous les dimanches paresseux à regarder Netflix. Netflix, c’est chouette aussi. La vie ne doit pas toujours être si sérieuse. Surtout si, entre temps, je me débrouille pour réussir mes études auto-disciplinées, tout en ayant travaillé dans divers lieux, visité sept pays en un an, perfectionné une langue que j’apprends (l’arabe c’est trop cool :D), donné une conférence, lu beaucoup de livres, esquissé le brouillon de ce qui sera peut-être le travail le plus important de ma vie, rencontré de nouvelles personnes, suivi une thérapie et traité lentement mes tendances dépressives, et même publié mon propre livre.

La liste continue; ce que j’essaie de dire, c’est que je n’ai peut-être pas un emploi stable, que je dépends encore de mes parents pour le moment, que je galère vraiment à prendre certaines de mes responsabilités d’adulte, que j’ai peut-être encore des crises d’angoisse au milieu de la nuit et que ça m’arrive encore d’avoir envie de mourir…. Mais ma vie est quand même plutôt géniale. Et je ne dis pas tout ceci pour me lancer des fleurs, non, je partage ceci pour t’encourager toi, lecteur, à t’honorer également de cette manière, car tu es un être humain magnifique qui fait plein de belles choses, et qui mérite d’être aimé. Par toi-même par dessus tout. 🙂

Pour en finir avec ce bilan positif, donc:

En 2018, il y a eu ‘En route vers d’autres mondes’, le livre qui concrétise mes rêves de devenir écrivain et qui a apporté une première pierre à l’édifice que j’espère construire grâce à mon travail, d’où l’allusion que j’y fais dans le titre de cet article. Car, je l’espère, il y en aura beaucoup d’autres! D’autres livres, d’autres routes, d’autres mondes. En 2019, et pour toutes les années qui suivront celle-là.

En attendant, je vous souhaite une très, très, très belle année 2019, et que celle-ci soit pleine d’amour et d’imperfection.

<3

Sophie

3 thoughts on “En route vers 2019

  1. Une écriture douce, qui exprime avec justesse le chaos de nos pensées qui ne cessent de nous traverser l’esprit. Super photos qui accompagnent le
    tout! En te lisant, je te trouve plus légère et tolérante avec toi-même. Une grande forme de respect aussi. Merci du partage! Je me réjouis de la suite! 🙂

  2. Un texte qui m’a touché. Le fait
    qu’on soit “assez”; tout simplement
    par le fait d’exister. Que personne
    n’a la vie parfaite, qu’elle est
    faite de hauts et de bas et qu’il
    s’agit d’accueilir ces moments tels
    qu’ils sont. Je trouve que c’est un
    précieux partage, qui montre que
    personne n’est parfait. Pourtant nous
    sommes tous parfaits dans nos
    imperfections. Nous avons le droit de
    nous s’accepter tels que nous sommes
    (d’ailleurs ce n’est jamais aquis,
    c’est un processus avec des jours qui
    vont biens et d’autres moins).
    Merci pour ce que tu amènes et ta
    bienveillance 🙂

  3. Merci beaucoup les filles pour vos
    commentaires qui me font énormément
    plaisir. Sabine, tu as entièrement
    raison, tout le monde est parfait à
    sa façon 🙂 Gros bisous, j’espère que
    vous allez bien <3

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